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Le Family Buy Out préservé pour l’essentiel


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Avec la fin décembre s’annoncent de nouveaux changements dans la fiscalité. Ils viennent s’ajouter aux multiples modifications déjà intervenues en cours d’année. Certaines ont même donner lieu à de curieux allers et retours sur des textes déjà votés comme en matière de droits d’enregistrement sur les cessions d’actions ou sur des textes en cours de vote comme en matière de taxation des plus-values. La cession des entreprises est ainsi, au regret de beaucoup, au cœur des changements d’imposition. Il est cependant une modalité de changement qui parait présenter une relative stabilité, c’est la transmission familiale de l’entreprise et tout particulièrement le "Family Buy-Out".

Rappelons en quelques mots son principe qui s’articule en une donation, une vente et un apport de titres. Avec l’allongement de la durée de la vie, le chef d’entreprise qui souhaite transmettre son entreprise à des membres de sa famille ne peut souvent se contenter de donner tous ses titres. Il lui faut aussi en vendre une partie pour se constituer un capital. Les repreneurs familiaux doivent donc faire face à une situation de rachat classique à laquelle ils peuvent répondre en créant une holding de reprise. Cette holding achète alors les titres que le chef d’entreprise souhaite vendre. Les titres donnés sont eux apportés à la holding de reprise. Cet apport d’une part limite le coût de l’opération puisque l’apport se rémunère non par une sortie de numéraire mais par une émission de titres par la holding. D’autre part, il augmente le nombre de titres qui fourniront des ressources à la holding pour payer la partie des titres qui sont acquis.

Dans le cadre des pactes Dutreil visés à l’article 787-B du CGI, sous réserve que diverses conditions soient remplies (notamment engagement collectif de conserver les titres pendant deux ans, et engagement individuel de conserver les titres pendant quatre ans après l’expiration de l’engagement collectif, exercice d’une fonction de direction par l’une des parties à cet engagement collectif ou par l’un des donataires), la donation bénéfice d’une réduction d’assiette de 75%. Jusqu’à ce jour, l’apport des titres à une holding de reprise n’entraîne pas remise en cause des engagements de conservation, là aussi sous réserve que certaines conditions soient remplies.

Quelles sont les conséquences des changements déjà intervenus où à intervenir.

En premier lieu, dans un Family Buy Out, il y a une cession d’une partie de ses titres par le chef d’entreprise, cession qui peut donner lieu à une plus value. Cette première opération ne bénéficie d’aucun aménagement spécifique et les plus-values correspondantes seront donc imposées dans des conditions normales en application des nouvelles règles, avec le bénéfice d’éventuels abattements.

Le régime des donations en ligne directe a été modifié à plusieurs reprises récemment avec en particulier l’abaissement de l’abattement de 159.325 € à 100.000€ par la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 et l’augmentation depuis le 31 juillet 2011 du taux de la dernière tranche de 40% à 45%. Ces deux modifications sont elles aussi très générales et s’appliquent aux opérations de FBO. En revanche la réduction de droit en fonction de l’âge du donateur a été supprimée à compter du 1er août 2011. Elle a toutefois été maintenue à 50% lorsque le donateur est âgé de moins de 70 ans et que la donation s’effectue en pleine propriété dans le cadre d’un pacte de Dutreil. Ainsi dans le cadre d’un FBO, si le chef d’entreprise a moins de 70 ans, la donation bénéficiera de cette réduction de 50%. De manière plus significative, la réduction d’assiette prévue dans le cadre des pactes Dutreil et les conditions pour en bénéficier demeurent inchangées. Cette réduction de 75% est un aspect clé du FBO.

Sous leur présentation initiale, deux des projets de réforme emblématiques semblent aussi laisser de côté les pactes Dutreil et ainsi le Family Buy Out. Il en est ainsi de l’apport-cession. On sait que l’apport de titres à une société soumise à l’IS pouvait bénéficier d’un sursis automatique d’imposition sur la plus-value d’échange et que sous certaines réserves, la cession ultérieure des titres apportés ne remettait pas en cause ce sursis.

Avec le nouveau régime envisagé, au contraire, un tel apport, lorsqu’il est effectué au profit d’une société contrôlée par l’apporteur, ne donnerait plus lieu qu’à un report qui prendrait fin notamment en cas de cession, sauf en cas de réinvestissement d’au moins 50% du produit de la vente dans le financement d’une activité commerciale, artisanale, libérale, agricole ou financière, et ce dans un délai, fixé dans le projet initial, à cinq ans à compter de l’apport. Un tel mécanisme ne concerne en principe pas les pactes Dutreil puisqu’il faut justement en cas d’apport à une holding que celle-ci conserve les titres apportés. Dans le projet, il est expressément prévu que cette réforme ne leur serait pas applicable. Cette exclusion a toutefois été supprimée dans le texte adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale.

Remettre en cause les donations-cessions

Ces opérations consistaient à donner des titres dont la cession pouvait prochainement intervenir. Les droits de donation devaient alors être payés dans les conditions normales. En revanche lors de la cession, la plus value était calculée sur la valeur retenue lors de la donation. En d’autres termes l’éventuelle plus value apparue lors de la donation était purgée.

Dans son état initial, le nouveau projet prévoit qu’en cas de cession ou d’apport de droits sociaux dans un délai de moins de deux ans (ramené à 18 mois dans le texte voté par l’Assemblée Nationale) de leur acquisition par voie de donation, la plus value serait calculée sur le prix ou la valeur d’acquisition de ces droits par le donateur augmentée des frais afférents à la donation. Autrement dit la donation ne conduirait plus à purger une partie, voire la totalité de la plus value. Un tel texte aurait pu poser un problème dans le cas d’un Family Buy Out puisque les titres donnés font en tout ou partie l’objet d’un apport qui peut faire apparaître une plus-value. Il est toutefois prévu que ce nouveau mécanisme ne s’appliquerait pas aux droits ayant fait l’objet d’une donation dans le cadre d’un pacte Dutreil.

Conserver l'essentiel de son attrait

A la lecture de ces différents projets et des réformes précédentes, il en ressort une relative augmentation du coût des transmissions familiales d’entreprise du fait de la baisse de l’abattement à 100 000€ et de l’augmentation des taux. Mais il apparaît aussi une volonté marquée de préserver un système facilitant grandement ces transmissions. Le rapport Gallois s’étant lui aussi prononcé pour le maintien sans modifications des pactes Dutreil pendant cinq ans, on peut ainsi espérer que le Family Buy Out pourra conserver l’essentiel de son attrait.

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